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SEN-ETHANOL, le projet agricole qui rend les sénégalais fous de rage

Au Sénégal, un projet agricole déchaîne les passions, entre insécurité alimentaire, souveraineté agricole et accaparement de terres. Reportage.

« Si on nous enlève notre terre, autant mourir », assène, en se tranchant symboliquement la gorge d’un doigt, le chef d’un des villages de la communauté rurale de Gnith, au nord-ouest du Sénégal.

Ici, c’est Belibambi : quelques cases parsemées en périphérie de la réserve naturelle du Ndiael, où les familles font paître vaches et zébus. Un sujet hante les conversations : « Sen-Ethanol, on ne peut pas cohabiter avec eux. S’ils viennent, on devra déguerpir d’ici, tôt ou tard », craint un de ces petits éleveurs.

Un projet agricole très controversé

Sen-Ethanol, c’est le nom d’un projet agricole controversé. Très controversé. Cette société à capitaux étrangers et sénégalais —couplée à Sen-Huile, une autre société dont elle est actionnaire— s’est vue affecter 20.000 hectares en août 2012 par l’Etat sénégalais. Des terres jusqu’ici dédiées au pâturage, comme près de Belibambi, où seront désormais cultivés tournesols et patates douces. Destination : l’exportation et le marché de l’énergie. Le projet se monte à au moins 100 milliards de francs CFA (152 millions d’euros).

Dans un pays qui n’assure pas son autosuffisance alimentaire et dont environ 70% de la population active vit du secteur primaire, ce projet est très sensible, charriant aussi bien son lot de détracteurs que de partisans. Dans la commune rurale de Ronkh, concernée comme celle de Gnith par le projet, quelques partisans plus ou moins loquaces se réunissent justement. « Que ceux qui nous contestent attendent de voir ce qu’on fait vraiment. Et ils seront rassurés », affirme un porte-parole de Sen-Ethanol face à une dizaine de chefs de villages. Calmes, la tête protégée du soleil écrasant et du vent sablonneux par des foulards, ils acquiescent. Pantalon et chemise en jean, baskets et casquette qui couvre la nuque. Benjamin Dummai, le PDG de Sen-Ethanol, chante les louanges du canal d’irrigation creusé depuis mi-octobre et depuis le lac de Guiers : « Passée la saison des pluies, les éleveurs doivent aller de plus en plus loin pour faire paître leurs animaux. Grâce à ce canal et à ceux qui y seront connectés —300 km en tout— l’eau ira irriguer nos cultures mais aussi des plantes fourragères permanentes. Nous les donnerons aux paysans pour nourrir leurs bêtes. » Que les éleveurs craignent de perdre leur source de revenu ancestrale ne serait donc, selon lui, pas justifié. Que dire alors des autres arguments avancés pour contester l’intérêt du projet ?

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Crédits: AK-Project