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Afrique de l’Ouest : Mise en place d’un programme de facilitation du commerce agricole pour la sécurité alimentaire

Le processus pour améliorer la contribution du commerce régional des produits agricoles à la sécurité alimentaire se poursuit en Afrique de l’Ouest. Du 09 au 11 décembre 2014 à Lomé(Togo), les acteurs ont apporté une dernière touche pour la finalisation d’un programme d’appui à la libre circulation des produits agricoles.

Démarré à Accra en janvier 2013, avec l’appui de l’USAID, le processus pour la mise en place d’un programme d’appui à la libre circulation des produits agricoles en Afrique de l’Ouest est aujourd’hui dans sa dernière phase. Diverses réflexions et concertations techniques et politiques, dans le cadre du processus Ecowap/PDDAA, ont permis de déboucher sur l’élaboration d’un programme "d’appui à la mise en œuvre des recommandations d’Accra sur la libre circulation des produits agricoles en Afrique de l’Ouest".

Aussi bien les Organisations d’intégration régionale (CEDEAO, UEMOA, CILSS) et leurs partenaires, ainsi que les acteurs non étatiques se sont activés afin d’appréhender les enjeux du commerce régional des produits agricoles pour la sécurité alimentaire et la résilience des populations.

Du 29 au 31 Janvier 2013, à l’initiative conjointe de la CEDEAO, de l’UEMOA et de l’USAID, s’était tenue à Accra, en République du Ghana, une conférence régionale sur le thème : "la libre circulation des produits alimentaires : améliorer la sécurité alimentaire en Afrique de l’Ouest par le développement du commerce intra-régional".
L’objectif était de "stimuler le dialogue entre les secteurs public et privé et d’identifier des mesures pour réduire les contraintes au commerce régional des produits alimentaires de base".

De 2013 à 2014, la question a fait l’objet d’une série de rencontres des parties prenantes pour analyser les enjeux et entrevoir la mise en œuvre des recommandations issues de la conférence d’Accra. L’étape de Lomé a permis de préciser le contenu des actions envisagées, le rôle de chaque partie prenante et la finalisation de la planification de la mise en œuvre du programme pour la première année.
Accroître le commerce régional

Les échanges intra régionaux de l’Afrique de l’Ouest représentent 11% à 12% du commerce global de la CEDEAO alors que pour l’UE (son principal partenaire) le commerce intra régional représente près de 80% de son commerce global. L’une des ambitions du programme est de contribuer pendant cinq ans à augmenter de cinq points le commerce des produits agricoles.

De nombreuses entraves au commerce persistent malgré l’existence d’un schéma de libéralisation. Outre les entraves routières, les problèmes de change avec l’existence de plusieurs monnaies, renchérissent les coûts des marchandises et limitent le commerce régional. La CEDEAO est aujourd’hui une zone de libre échange et projette d’être une union douanière dès le 1er janvier 2015.

L’aboutissement du processus de l’union douanière, avec la mise en place du TEC, est attendu comme une évolution majeure susceptible de booster le commerce régional en Afrique de l’Ouest. Le TEC est prévu pour être mis en œuvre en janvier 2015 avec un moratoire de cinq ans, période au cours de laquelle les discussions se poursuivront sur un certain nombre d’aspects et de sujets qui n’ont pas encore fait l’objet de consensus.

Lors de la conférence d’Accra sur la libre circulation des produits agricoles, les participants ont discuté particulièrement des entraves et obstacles au commerce régional, notamment en ce qui concerne : les tracasseries routières, le prélèvement
de taxes illicites, les restrictions à l’exportation des céréales et autres produits vivriers que décrètent les Etats à l’occasion des crises alimentaires, la question des certificats d’origine, les certifications vétérinaires, sanitaires et phytosanitaires, et l’application de la Taxe sur la Valeur Ajoutée (TVA) aux produits du crû originaires de la région.

Les commerçants et les transporteurs de la région Afrique de l’Ouest y dénoncent fréquemment de nombreux les obstacles formels et surtout informels limitent l’extension du commerce, et en renchérissant le prix des produits, freinent leur accessibilité pour la plupart des consommateurs et en particulier les pauvres. De la même façon, ces entraves induisent une pression à la baisse sur la rémunération des producteurs, freinant ainsi leur capacité d’investir pour améliorer la productivité. Enfin ces obstacles aux échanges créent un climat d’incertitude très préjudiciable à l’investissement des différents acteurs des chaines de valeur".

Démultiplier les points et corridors d’observations

La conférence d’Accra avait débouché sur cinq recommandations fortes : (1)Assurer une bonne communication des règles en vigueur auprès des différents publics cibles (agents des services aux frontières, opérateurs économiques et organisations professionnelles) en mettant à contribution les médias à tous les niveaux (local, national et régional) ; (2) Veiller au respect de la réglementation, ce qui induit des responsabilités spécifiques au niveau des institutions publiques nationales et régionales, et au niveau des différentes catégories d’opérateurs et de leurs associations et organisations professionnelles ; (3)Mieux documenter l’importance du marché régional dans la sécurité alimentaire de chaque pays et de la région ; (4)Développer le plaidoyer dans chaque pays et structurer le dialogue public/privé à cette échelle pour amener les Etats à respecter les engagements qu’ils ont pris au niveau régional ; et (5)Doter la région d’une politique commerciale intégrée.

Les travaux de suivi et d’observation des échanges, effectués par le Comité Inter Etats pour la lutte contre la sécheresse dans le Sahel (CILSS) et l’Alliance Borderless, à travers certains corridors, ont montré qu’en dépit des efforts, les tracasseries routières et pratiques anormales persistent. Les faux frais payés par les acteurs pour la circulation des personnes et des biens demeurent dans tous les pays et restent à des niveaux nuisibles au commerce régional.

A la suite des interventions introductives, les participants ont insisté lors des travaux de Lomé sur : la nécessité de démultiplier les postes et corridors de suivi et d’observations, notamment sur le corridor Accra-Cotonou-Lagos et de prendre en compte de nouveau corridor comme celui Niamey-Lagos ; et la nécessité de prendre en compte les différents modes d’acheminement du transport des bétails notamment le passage sur pieds par le biais de la transhumance.

De l’avis de plusieurs opérateurs économiques, il est moins coûteux de faire des échanges entre un pays de la région et un pays occidental, qu’au sein de la région. Ce constat est confirmé à l’échelle continentale, lors de la dernière conférence annuelle du ReSAKSS. Au nombre des obstacles aux échanges soulignés figurent : (i) la persistance de multiples fragmentations des politiques commerciales et monétaires, (ii) les problèmes sécuritaires, (iii) les imperfections et la corruption des administrations de contrôle, (iv) la sous information chronique des acteurs sur les dispositions communautaires pour le commerce régional, (v) la propension de certains Etats à prendre des mesures d’interdiction d’exportation des produits vivriers, céréaliers notamment, lors des crises alimentaires et (vi) la complexité des procédures pour obtenir les agréments auprès des ministères de l’industrie et du commerce. Ces obstacles sont matérialisés par la multiplication des points de contrôle le long des principaux corridors, et la multiplication des taxes illicites. Cette situation renchérit les prix des marchandises, une fois parvenues à destination.

Bien que ne disposant pas de politique commerciale commune, la région vient de parapher un Accord de partenariat économique (APE) avec l’Union européenne, pour la mise en place d’une zone de libre échange entre les deux régions. De l’avis de certains spécialistes, la mise en œuvre de cet accord se traduirait par un accroissement du commerce entre l’Europe et la région au détriment du commerce au sein de la région.

Dès sa création en 1975, la Communauté Economique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO), a fait de la libre circulation des personnes et des biens, un enjeu majeur pour la promotion du marché régional et la construction de l’intégration économique de la région.

Par Abel Gbêtoénonmon

WANEJ / Agence Afrique Performance

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Crédits: AK-Project